Vers DrakPoint
Whiteverse, 00h05.
C'était une nuit comme les autres
à Europazia, capitale des United States of Eurasia. Les boites de nuit
commençaient à peine à s'ouvrir, les cyber-cafés recevaient leurs derniers
clients avant d'être complets, les rues
étaient pleines gens en apparence heureux, prêts à faire la fête toute
la nuit. Quoi de plus normal que cette hyper-activité pour une ville-monde ?
Mais derrière cette joie, surplombant l'endroit, les ruines du Beffroi, vestige
anéanti d'un passé lointain, souvenir des créatures ayant manqué de causer
l'Apocalypse, rappelant irrémédiablement que le danger était partout.
Et dans la nuit illuminée, un
jeune adulte des plus eurasiens était assis dans son canapé, dans son
appartement, devant sa télévision, à regarder un « docufiction » -
comme les médias aimaient les appeler – sur les super-héros pendant la Guerre
Froide et leur lien avec les mythes qui berçaient l'Europe depuis sa naissance.
En fait c'était surotout pour revoir le film inspiré des exploits de la Ligue
de Vengeance avec Alexandre Astier et Frédéric Diefenthal dans les rôles
principaux, mais les parallèles faits avec la mythologie l'intéressaient tout
autant.
Dans sa main gauche, il tenait un
café qu'il avait lui-même fait chauffer – avec sa bouche, car il avait la
capacité de cracher du feu, car il était Ryumaru, l'étrange héros
franco-japonais arborant le nom de Drak Béryl.
Et c'est sans doute pour ça que
sa main droite jouait inconsciemment avec le sabre posé à côté de lui ou qu'il
portait ce costume vert et orange orné d'un D. Le garçon avait déjà fait une
patrouille nocturne et en rentrant il n'avait pas retiré son accoutrement, sauf
son masque, pour boire et regarder la télévision c'était beaucoup plus pratique.
Il le gardait tel un fardeau, comme pour justifier la voie qu'il avait choisi
ce soir comme tous les autres soirs : la solitude.
Pourtant, la solitude était
quelque chose que Ryumaru détestait, il en avait même peur, lui qui avait ce
besoin de s'extérioriser perpétuellement. Quand il était seul il finissait par
se parler à lui-même ou – comme c'était le cas maintenant – par se perdre dans
ses pensées, enchainant les réflexions douteuses sur lui-même en regardant un
film ou une série jusqu'à être sorti de son état mental par une réplique culte,
qui le réveillait métaphoriquement. Ici par exemple, c'était le moment où le
légendaire héros franco-belge Benelix tentait de défendre la cause des héros le
2 janvier 1992, il frissonait toujours en l'entendant :
« Monsieur le Président,
vous dites que les héros sont la cause directe du Mal mais si vous supprimer
les héros, qui vous protègera, qui fera reculer ce Mal ? Vous le pensez disparu
maintenant que la Guerre Froide est finie ? Mes camarades et moi-même
avons vu des choses que même vous n'oseriez pas imaginer ! Ce Mal comme vous
l'appelez finira par renaitre et nous devons être là pour le vaincre à nouveau,
sinon il proliférera jusqu'à anéantir la nouvelle union que vous essayez de
mettre en place. Je comprends vos projets et vos doutes Monsieur le Président,
mais vous ne pouvez pas... »
La Ligue de Vengeance se
stoppa net, dans tous les sens du termes et apparut sur l'écran une jolie brune
face à la caméra, un micro dans la main avec derrière elle un amas de ruines.
« Flash Info : …
-
Ca a intérêt à être important, sinon j'y vais et
je porte plainte en direct ! s'exclama vivement le jeune homme. J'imagine tout
à fait la scène : « Flash Info : Un adolescent en pyjama vert et orange
porte plainte contre une journaliste qui a interrompu un film qui n'a été
diffusé qu'en Europe et en tant que téléfilm au Japon dans une soirée
spéciale. » Ils vont se foutre de moi, surtout dans ce costume en fait.
-
Ici Emeline Dublin en direct des ruines de ce
qu'était le Beffroi où Drak Béryl semble vouloir faire passer un message.
-
Correction : ils se foutent déjà de moi. »
La caméra s'approcha en gros plan
sur être se dressant au-dessus des ruines et semblant incarner la peur
elle-même vu l'aura qu'il dégageait. Mais la stupeur de Ryumaru fut encore plus
grande encore quand il comprit que le costume porté par ce type était identique
à celui que lui-même portait à ses débuts à la différence que les couleurs
étaient inversées, le vert à la place du orange et le orange à la place du vert.
Pour le samouraï, ce n'était qu'un amateur qui cherchait à l'imiter, en vain.
Il ne le prenait pas au sérieux et pensait que personne ne serait assez fou
pour le croire...jusqu'à ce que la journaliste ne lui passe le micro.
« Europaziens,
Europaziennes, Drak Béryl à retourner sa cape – même si après réflexion il ne
porte pas de cape.
-
Ca devient encore plus flippant le coup du mec
qui fait les mêmes blagues que moi.
-
Alors si je vous donner un conseil chers
téléspectateurs, chères téléspectatrices, et même toi ma chère Emeline...
Il marqua une pause pour fixer la
caméra avec ce regard terrifiant, rempli d'une haine profonde.
-
Fuyez. »
Un coup de feu retentit et
l'enregistrement se stoppa net et la télévision de Nogard n'affichait alors
plus qu'une espèce de neige tout en émettant cet horrible bruit de programme
crypté. Bizarrement, alors que son coming-out avait été diffusé partout dans
Europazia et qu'il entendait dehors les gens fuir en hurlant, la seule pensée
qui l'animait était de savoir comment allait Emeline Dublin....
« Comme quoi, j'ai bien fait
de garder mon costume. » lâcha Ryumaru pour briser le silence perturbant
tout en enfilant son masque.
Discrètement il sortit de chez
lui par la fenêtre, se servant de son sabre pour atterrir en douceur dans les
rues d'Europazia. La panique massive déclenchée par l'effet médiatique
empêchait les passants de le voir, trop occupés à fuir, sauf cet enfant. Celui
même qui aperçut le véritable héros et qui se souvenant de ce qu'il avait vu à
la télé quelques minutes plus tôt se mit à pleurer. Avant, il était adulé, mais
cette nuit il inspirait la crainte.
Ca le détruisait
psychologiquement alors qu'il avançait vers le Beffroi et que tous ceux qui
croisaient son chemin reculaient. Son image vis-à-vis de la loi n'avait jamais
été quelque chose d'important pour lui, mais il voulait être le héros du
peuple, il voulait voir de l'admiration et de la confiance dans leurs yeux et
jusqu'à aujourd'hui, il en voyait et ça lui suffisait. Mais ce monstre ayant
usurpé son identité avait réduit en cendre cette confiance.
« Il le paiera. »
Quelques minutes plus tard, le
jeune homme avait atteint les ruines du monument historique et scrutait pour
repérer le faux Drak ou la journaliste, avec toujours en tête cette image de
l'enfant qui s'était enfuit dès qu'il l'avait vu, plus jamais il ne voulait
revivre ça. Et personne ne semblait là.
« Alors le légendaire Drak
Béryl a répondu à mon appel ? Merci !
La voix saccadée, à la fois aigue
et sombre semblait venir de nulle part jusqu'à ce que le héros eurasien se
rende compte que quelque chose avait sauté d'un toit derrière lui. Et que cette
chose pointait désormais un pistolet collé à sa nuque. Il aurait pu paniquer
mais ce n'était pas son genre et il était trop tard, il resta calme et répondit
d'un ton cynique et assuré, poussé par l'orgueil et par l'honneur japonais :
-
Afin de préserver le monde de la dévastation et
du mauvais goût, Drak Béryl plus rapide que la lumière !
-
Hum...Je vois que ce qu'on raconte sur ton sens
de la répartie est fondé mais...
-
Non,
personne ne flatte mon égo avant que j'ai mes réponses ! Où est Emeline ?
-
Cette...cette journaliste insignifiante ?!
Et l'Imposteur rit. Un rire
diabolique qui énervait Drak Béryl même s'il se souvenait que plus jeune, il
s'amusait à imiter les rires des méchants des dessins-animés. Sauf qu'en
général, c'était jamais bon signe, ou alors le méchant était juste un taré...
Devant l'exaspération du héros,
il prit une grande inspiration et arrêta de rire.
-
Je l'ai laissée partir, comme tous les autres.
Je suis pas un monstre qui tue des gens pour le fun. En plus je sais très bien
qu'il n'y a pas besoin de cadavres pour t'atteindre.
Ce pseudo Drak Béryl avait
raison. Juste en attaquant son image il avait réussi à l'atteindre, et si son
altruisme n'était qu'une façade cachant son besoin de reconnaissance ?
-
Pose moi la question qui t'intéresse vraiment.
-
Qui...es-tu ?
-
Mon véritable nom n'a aucune importance, tu n'as
qu'à me donner un nom théâtral...Appelle moi l'Anté-Drak !
« L'Anté-Drak » marqua
une pause tandis que son masque vert se transformait en une tête barbue aux
yeux bleus et aux cheveux chatains-gris ébourrifés évoquant un acteur anglais.
-
Je peux être aussi un Docteur cynique et
acerbe...
Nouvelle transformation, cette
fois c'était un visage entièrement recouvert d'un maquillage blanc et des
cheveux verts.
-
Ou le prince du crime, ce serait à mourir de
rire !
-
L'influence de la culture américaine sur les
jeunes, c'est horrible. Si tu me dis que t'es Chuck, je te force à appuyer sur
la détente.
Nogard essayait désespérément de
toujours paraître sur de lui mais il tremblait. Il pensait avoir déjà vu pire
mais en un sens, jamais de sa vie il n'avait rencontrer de polymorphe et c'est
en tous les cas ce que semblait être son nouvel ennemi. Ce dernier avait l'air
d'en savoir beaucoup sur le jeune homme, ses capacités faisaient que le Dragon
était dans l'incapacité de savoir depuis combien de temps il était à Europazia
et derrière combien de visages il s'était caché. Ca pourrait être quelqu'un
qu'il croise tous les jours, ça pourrait être...n'importe qui.
-
J'ai largement le temps de fuir avant que
l'équipe de ton gouvernement n'arrive et que tu n'aies de sérieux problèmes. Je
n'ai rien à gagner si je te tue. Mais bon, pourquoi pas ? »
Tandis que la tête du polymorphe
redevenait une version verte du masque de Drak Béryl, il appuya lentement sur
la gachette, laissant un temps de réflexion au héros. Lamentablement il avait
foncé, tête baissée dans un piège plus grand que son égo, tout ça parce qu'il
était narcissique et s'était servi du sauvetage d'une journaliste comme d'un
prétexte. S'il n'avait pas agit d'une façon aussi stupide et désorganisée, il
n'en serait peut-être là. Mais il était trop tard pour les remises en
questions, un frisson le parcourut une fois la gachette enoncée et maintenant
il était....mouillé ?!
« Je...qu'est-ce qui se
passe ?
-
Un pistolet à eau, j'ai pensé que ça pouvait
être utile pour vaincre un cracheur de feu ! »
-
C'est...une blague ?!
-
Evidemment, je te l'ai dit, je ne suis pas un
criminel, je ne tue pas quand je peux m'en passer, je veux juste
t'arrê.... »
Pas besoin de le laisser finir sa
phrase, Ryumaru donna un coup de coude à son agresseur pour le déséquilibré
avant de saisir son sabre à deux mains et de le retourner contre lui. La farce
était finie et il venait de le comprendre. Ce type avait beau être un clown, il
était puissant, sournois et surtout polymorphe, le véritable combat allait
commencer et ça n'allait pas forcément être beau à voir.
« Je voulais être cool avec
toi...
-
Et tu vas couler sans moi !
-
Ne sois pas si méchant, voyons, je voulais te
faire un cadeau : te montrer mon vrai visage.
Sur ces mots, l'Anté-Drak
développa légèrement sa masse musculaire avant de changer complètement de
costume, transformant son accoutrement en un sweat à capuche vert, en partie
déchiré orné d'un symbole japonais.
-
Là ça fait moyen le côté
« Anté-Drak ».
-
Green Hood sonne mieux !
-
Si tu le dis. »
Le samouraï essaya d'asséner un
coup de sabre à la capuche verte mais ce dernier para le coup en se servant de
son bras gauche transformé en lame avant de faire de son bras droit un marteau
géant pour métaphoriquement faire décoller Drak Béryl. Atterri dans les ruines
du Beffroi, blessé, le héros ne lâcha
toujours pas son sabre et se releva difficilement avant de soulever son masque.
L'esprit torturé de Green Hood comprit ce qu'il allait faire, mais trop tard.
« Je me suis toujours
demandé quelle était ma distance maximale ! »
Drak Béryl cracha un torrent de
flamme sur son ennemi qui eut le réflexe de transformer ses bras en bouclier
pour tenter de se protéger mais le feu l'avait fait reculer et il était couvet
de brûlures. C'est dommage car il ne voulait pas en arriver là, malgré les
ordres qu'il avait reçu, il avait toujours peur de perdre le contrôle et de
tuer tout ce qu'il pourrait trouver dans un combat aussi épique. Ca lui était
déjà arrivé, il s'en souvenait et il savait aussi que les choses dont il ne se
souvenait pas impliquaient aussi ce genre de détails.
« Connais tu l'histoire,
Drak Béryl.... »
Son corps commença encore à
évoluer, se recouvrant d'abord de poils, puis laisant apparaître des griffes
sur ses membres inférieurs comme supérieurs. Ses yeux devinrent jaune, sa face
elle-même se modifiait, il n'était plus un homme...mais un loup géant.
« Du garçon qui criait au
loup ?! »
Un bond qui équivaudrait au bon
de 100 hommes, une rage inarrêtable, il allait écraser Ryumaru, qui comptait se
protéger l'empaler en mettant son sabre vers le haut. Mai sans prévenir, il
disparut soudainement, laissant derrière lui des grognements et un hurlement
canin trahissant la bête qui someillait en lui.
Le franco-japonais, perdu, avança
vers la zone où le Loup avait disparut, des dizaines de questions fulminaient
dans son esprit. Qui était-il ? Avait-il réellement disparu ou était-il devenu
invisible ? Pourquoi en avait-il après lui ? Et surtout....
« Où est-il ?!
-
Plongé dans une autre dimension.
La voix féminine et puissante qui
avait répondu à Drak Béryl se trouvait à quelques mètres de lui. Impressioné il
se tourna vers elle sans trop comprendre ce qu'elle était. La décrire
physiquement était presque impossible, ses yeux noirs fixaient le héros, ses
cheveux de la même couleur étaient couverts de lauriers. Pieds nus, le seul
vêtement qu'elle portait était une robe de la grèce antique. Elle était
également couvertes de bracelets égyptiens et était armée d'une croix
ansée. De plus, l'aura qu'elle dégageait
était paradoxalement à la fois rassurante et inquiétante, tout en imposant le
respect. En résumé, elle était...divine, à proprement parler.
-
Mon dieu, qu'est-ce qui va encore m'arriver ?
-
Tu ne fais pas si bien dire, même si j'aurais
employé le mot « déesse ». coupa-t-elle avant que Ryumaru n'ait le
temps den rajouter. Quoi qu'il en soit ne pose pas plus de question, dis toi
juste que je suis une « War Lady ».
-
Drôle de façon de dire que vous êtes une envoyée
du gouvernement qui va m'enfermer.
-
Cesse d'être cynique, si tu tiens à la vie,
mortel ! J'ai vu ce qui s'est passé. Green Hood est tombé dans une fissure
dimensionnelle, déjà présente mais ouverte pleinement après l'attaque des
Liktalzzz...
-
Et...
-
Chut. Je peux t'aider à le poursuivre.
-
Comment ?
-
Tu n'écoutes rien ? Je suis une déesse. Mais si
je te donne le pouvoir de le poursuivre, tu devras faire très attention.
Sans prendre réellement le temps
de réfléchir, Drak Béryl mais rassuré par cette présence féminine et désireux
de se venger hocha la tête. Il aurait pu ne pas la croire mais elle lui
inspirait la confiance et dans un unives rempli de failles, de créatures
surnaturels et de gens à pouvoirs, pourquoi ne pourrait-il pas y avoir des
dieux ? Même si cette déesse là il ne l'avait jamais vue.
-
J'accepte.
-
Parfait.
La War Lady toucha le crâne de
Ryumaru qui sentit alors tous ses muscles se réchauffer. Ses yeux se mirent à
briller, même à travers son masque et le symbole d'une croix ansée frappée par
la foudre se dessina sur son costume. Il était devenu le hérault d'Osira et il
se savait parcourut par un grand pouvoir alors que celle qui le lui avait donné
disparut en un éclair.
« C'est parti ! »
Encore une fois, sans réellement
chercher à comprendre, il réussit à ouvrir un portail dimensionnel et pénétra à
l'intérieur. Drak Béryl était prêt à se venger.
Pendant ce temps, dans d'autres
dimensions, Sentinel s'adaptait à la vie moderne, Raphaël menait ses enquêtes
paranormales, World Justice sauvait le monde, Dark Fates était aux prises avec
les zombies et autres menaces infernales. Et les autres héros continuaient
d'être héroïques. Tout allait pour le mieux, dans le meilleur des Multivers
possibles...
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